Historique Suite
D'Aix-En-Provence
 

C'est l'époque où s'édifièrent les plus nobles architectures, où furent tracés les quartiers :

- De Villeneuve, à l'Est, en 1583 ;

- De Ville verte, au couchant, en 1605 ;

- D'Orbitelle ou Mazarin, au Midi, en 1616.

 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 

Ils demeurentdes modèles accomplis d'urbanisme : oeuvre d'enthousiaste émullation autant que de sage administration, à laquelle collaborèrent les architectes et sculpteurs Pugets, Toro, Fossé, Pavillon, Rambot, Chastel, Les peintres Finsonius, Daret, Vanloo, Fauchier, Cellony, Arnulphy et ce d'André Bardon qui décora une salle publique de musique dans la ville de Campra.

Mais si Aix ne fournit guère que Campra et , plus tard, Félicien David à l'histoire de la musique, de l'activité de combien de lettres ne déborde-t-elle pas ! Venus dans le sillage du gouverneur, Malserbe, du Vair, Mme de Sévigné parent le paysage intellectuel Aixois d'une douceur d'Ile de France. Mai les noms provençaux du poète Bellaud et la Bllaudière, fondateur, au XVIe siècle, de la première Renaissance de la poésie d'Oc, des dramaturges Brueys, Zerbin, Jean de Cabannes, de l'humaniste Peyresc, du maitre de l'Université Gassendi, des philosophes Vauvenargues et d'Argens, du bibliophile Méjanes, fondateur, en 1786, de la célèbre bibliothèque du Pays de Provence, de l'istorien Mignet, disent le culte aixois des lettres resté intact pendant des siècles. Constantin, Granet, Loubon y continuent, dans la première moitié du XIXe siècle la haute tradition de la peinture aixoisse. Les sciences n'y florissent pas moins avec les botanistes Adanson, Tournefort ; ni la jurisprudence avec Siméon et Portais ; ni même l'éroïsme avec le Chevalier de Forbin, le Marquis de Vabelle, le Bailli de Suffren, l'Amiral d'Entrecasteaux.

La Révolution, en supprimant les provinces et en amoindrissant considérablement le rôle d'Aix, lui permit cependant de jeter un vif éclat grâce à la fougue de son député à la Constituante, Mirabeau. Son adversaire, l'Assesseur à la Constituante, Mirabeau. Son adversaire, l'Assesseur Pascalais, cependant, s'illustrait héroïquement en défendant jusqu'au martyre les privilèges provençaux. Mais les temps de la puissance politique étaient sans doute clos. Désormais, c'est par sa seule tradition de foyer d'Art et de poésie, née de la beauté de son ciel autant que du goût de ses habitants pour les nobles activités, que l'Athènes du Midi étend sur la Provence sa royauté spirituelle.

C'est la ville de tous les maintenances du pays, intellectuelles, artistiques, religieuses, populaires. Et il n'est pas jusqu'à sa tradition de grands « jeux» annuels, établie par le Roi René avec son fameux cortège de la Fête-Dieu, réjouissance mi-chrétienne, mi-payenne des Aixois pendant des siècles, qui ne s'y perpétue sous l'aspect, plus moderne, du Carnaval aixois, rival de celui de Nice...

Capitale administrative déchue, Aix a accru, peut-être, son prestige culturel. Ses musées ont accueilli et rendu accessibles les plus prestigieux témoignages de son opulence passée. Son Université est des plus prospères, quis'illustrant d'avoir enseigné le jeune poète maillannais qui entandait en lui chanter les strophes de Mireille, appelle les jeunes élites intellectuelles françaises et étrangères à venir se former dans un cadre et parmi des paysages qui constituent, par eux-mêmes déjà, une haute leçon de mesure classique. Surtout, pour l'«honnête homme», le lettré, l'amateur d'art, de quelque pays qu'il vienne, Aix (oùse tint en 1854, sous le nom de Roumavàgi dei troubaire, l'Assemblée devenue légendaire des poètes provencaux. d'où sortit le Felibrige) reste la capitale d'un pays que la voix de Mistral a rendu synonyme de poésie et de fidélité à la plus haute tradition d'humanisme vivant. Et elle reste aussi, sous le signal hallucinant du Mont Sainte-Victoire, la ville de Cézanne, dont les chefs-d'oeuvre ont rendu famillières, de Boston à Tokio, les arrêtés des collines, la candeur pulpeuse du ciel, la beauté de la terre aixoise... Peu de destins, ouverts sous le signe des baitailles, se prolongent vers d'aussi harmonieux horisons.

Louis Malbos

Conservateur du Musée des Beaux Arts